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06/06/2015

Challenge

Prochaine exposition dans le Lot et Garonne: les artistes (très) sélectionnés doivent plancher sur un thème: le Bonheur! Pour retrouver le lancement et les conditions de ce projet se reporter au magazine Miroir de l'Art.

Ouille, mais qui a eu cette idée saugrenue alors que tout le monde sait très bien que "Les plus désespérés sont les chants les plus beaux", Alfred de M., pour vous servir.

Il a fallu s'y coller et j'en connaît d'autres qui ont dû se gratter la tête

Et puis ça vient et puis on se dit pourquoi pas, un tableau sur le bonheur,  ça existe? on tente le coup?? quel challenge! est-ce que je mets quand même un crâne ou un monstre quelque part ou bien ça va pas le faire?

Outre cette œuvre clairement impossible, chaque artiste expose une série de toiles ou de sculptures, dans un espace immense

Bienvenue à la galerie Egregore, qui m'accueille avec onze autres artistes, pour tout l'été

 

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                            Courants froids, pigments à l'huile sur toile, 30x30cm

 

 

 

 

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01/10/2014

galerie Chantal Mélanson

La galerie fête ses 20 ans et je fais partie des heureux élus qui partagent cet anniversaire en belle compagnie

En introduction voici le texte d'un écrivain norvégien inclassable et merveilleux, Tarjei Vesaas, mort en 1970; on peut le lire au début de son dernier livre: La barque le soir

Je ne sais pourquoi, des barques (ou des arches peut-être) sont apparues dans ma peinture, comme une évidence,

et les mots de Vesaas résonnent.

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31/07/2014

Miroir mon beau miroir

 

 

A Florence, la quantité de chefs d'oeuvre au m2 est, au sens propre, incalculable.  La quantité de touristes dans les lieux désignés comme "à voir absolument" porteurs d'une autogreffe numérique (appareil photo ou tablette)  est tout aussi incalculable. L'usage immodéré de cet appendice qui a poussé asymétriquement sur un des deux bras dont l'espèce humaine est pourvue opère (à moins qu'il n'en soit la conséquence) une sorte de réduction de la pensée qui se traduit par deux types de postures:

soit

regarder l'art, la ville, le paysage, sur l'écran qu'on fixe en permanence (de peur de manquer quelque chose qui serait sur l'écran et pas en vrai?)

soit

tourner le dos au tableau, à l'architecture, au point de vue, pour être photographié devant, et être associé pour la postérité, soi-même- en- personne- moi- parce- que- je- le- vaux- bien, au fond d'écran grandiose et surtout célèbre qu'on n'avait entrevu, auparavant, que sur les catalogues de l'agence, avec d'autres crétins au premier plan. Bien entendu, on ne le voit pas mieux puisqu'on ne le regarde pas, mais le but est ailleurs.

Ainsi ces merveilleuses peintures vieilles de plusieurs siècles, réalisées par des artistes exceptionnels, qu'on a la chance, parce qu'on est riche et libre de ses mouvements, de voir en vrai, peut-être une fois dans sa vie, à peine si on les regarde quelques secondes: plus précisément, on les repère, on les traque, et, impérieusement, comme mu par une nécessité profonde qui engage tout son être, sûr que c'est l'acte le plus utile et le plus urgent, on les prend en photo: parfois de travers, mal cadré, avec des têtes casquetées au premier plan et le reflet sur la vitre, peu importe, le cliché ira se ranger bien sagement à la suite des milliers d'autres engrangés déjà afin de montrer aux autres, ou de se montrer à soi-même, ultime perversion masturbatoire, à quel riche vécu culturel on a participé.

J'y étais, j'étais Là.

En 1434, Van Eyck écrivit sur le fameux portrait des époux Arnolfini: « Johannes de Eyck fuit hic » (« Jan Van Eyck fut ici »), et dans le miroir courbe du fond, le peintre est ce reflet lointain et minuscule qui conçut et réalisa lors d'interminables et nombreuses séances de travail, une des peintures les plus remarquables du XV ème siècle. Lui aussi dit: "j'y étais" mais faut-il commenter la distance inouïe, que dis-je, l'abîme qui sépare ces deux affirmations à la première personne presque identiques dans les termes si ce n'est dans les formes, que dire de ce précipice entre le peintre Van Eyck qui, en signant une oeuvre majeure mais dont il ne peut prendre à ce moment la mesure, nous plonge en même temps dans une réflexion sur le temps et la vanité des hommes, et le touriste suant et affairé, soucieux de prouver au monde entier et à lui-même (car en étant si peu présent, est-on bien sûr de ce qu'on vit?), qu'il y était?

Et le miroir, celui du XVème, rare et précieux, encore réservé à quelques privilégiés jusqu'au XIXème, répond au miroir du XXIème siècle, tellement répandu qu' un reflet vaut mieux que la chose, que l'image est plus désirable que ce qui la produit.

Car nos miroirs actuels sont magiques, ils gomment les erreurs, traquent le défaut, lissent les rides, et, surtout, gardent sans effort la mémoire qu'on leur désigne. Et puis l'image n'a pas d'odeur. On la préfère au réel, comme si on devenait paresseux devant la complexité du monde et imperméable à sa poésie, inquiet aussi de ses erreurs et de ses failles, de ses imperfections et irrégularités, et juste capable de s'en approprier des parcelles parfaitement circonscrites et indiscutables, consommables à loisir, propres à l'exhibition de bureau, grâce au geste facile de la pression d'un doigt sur un engin obéissant, performant, acheté au meilleur prix et possiblement fabriqué dans les pires conditions.  Monde  binaire, on/off, cumulatif et métonymique, pauvre dans l'opulence.

Un langage, dans la foule, n'a pas été partagé, il s'est perdu.

 

Aux Offices, Botticelli a la faveur des groupes. Une grande vitre un peu poussiéreuse sépare le public de ce croissant chaud de la peinture renaissante dont chacun veut sa part. Une masse permanente et internationale s'agglutine devant le Printemps et la Naissance de Venus; les bras sont tendus et se terminent par un moignon en forme d'objectif, on entend des clic et des clac, on a envie de donner des claques et de prendre ses cliques, mais il suffit d'aller un peu plus loin, un grand Ucello est presque seul, l'Annonciation de Léonard est disponible, un petit Dürer nous attend, Caravage est derrière la porte, il repousse les murs à lui tout seul et en sa compagnie, la seule femme peintre (et quel peintre!) de tout ce musée: Artemisia Genteleschi*.

La Peinture est là, malgré tout, quel bonheur!

http://www.tuscanytravels.info/files/6419.jpg

 

 

 *extrait de la biographie de Artemisia:

"En tant que femme, il lui est impossible d’accéder aux académies des Beaux-arts et de recevoir un enseignement artistique. Son père va donc, en 1611, lui fournir un précepteur en la personne d’Agostino Tassi (1566-1644), peintre maniériste. Mais celui-ci tente de séduire Artemisia et la viole. Tassi promet le mariage en mentant sur son état-civil car il est déjà marié. Orazio Gentileschi porte plainte devant le tribunal papal plusieurs mois après le viol. L’éthique religieuse et les pratiques judiciaires de l’époque conduiront à torturer la jeune fille de dix-huit pour s’assurer de son innocence"

27/12/2013

Jean Rustin, la leçon de peinture.

Le 24 décembre 2013, Jean Rustin est mort.

Chacun s'accorde à reconnaître maintenant l'oeuvre majeure de ce peintre qui reste cependant en deçà d'une réelle célébrité et des frontières du médiatisable.

 Cette discrétion est souhaitable car aucun tintamarre, aucun résumé réducteur de son parcours de peintre, de "l'inquiétante étrangeté" de ses tableaux comme de la non moins inquiétante familiarité qu'ils nous renvoient en miroir, ne sauraient servir un homme qui ne cherchait ni la gloire ni les honneurs, ne courrait pas les salons où l'on cause, et se distinguait par son humilité et sa gentillesse, une forme de simplicité du coeur et du langage, celle qui n'appartient qu'aux trés grands.

Un peintre contemporain, ça existe?

Pas par le "grand" public, car l'oeuvre n'est pas commerciale, bien que remarquable et exceptionnelle. Si l'audience s'est élargie aprés avoir été longtemps limitée à quelques amateurs rares, la peinture de Rustin prête peu le flanc aux dérives décoratives et aux arrangements mondains.Elle va mal dans les salons et jure avec la couleur des rideaux. Il faut la cacher quand on reçoit.

Pas non plus par les institutions qui ne se sont guère intéressées à cette peinture si terriblement humaine et dérangeante, non conforme là aussi aux standards de l'art actuel dont le formatage procure plus d'ennui que de réels scandales.

Alors c'est la passion de quelques uns, individus et galeries, convaincus, qui ont permis que cette oeuvre advienne à elle-même et que vers la fin de sa vie Jean Rustin quitte le presque anonymat qui a été son lot pendant des années. La critique a retourné sa veste, changé ses adjectifs: le peintre "pornographique" est devenu un génie de la fragilité des hommes..

Jean Rustin, lui, n'a pas changé, il a continué à travailler tous les jours, et à vous répondre avec son petit sourire malicieux jusqu'à ce que le corps, non plus celui qu'il a peint à longueur de toile, mais le sien, le trahisse définitivement.

Ce corps exposé et nu pour dire la nudité de l'âme (les peintres doivent se servir de l'image sinon comment peindre l'âme et ses tourments) a fait scandale, a semblé provocant, désespéré, dément, honteusement obscène.  Pourtant c'est un miroir de ce que sans fard nous sommes et devenons chaque jour, cette chair fragile et pulsionnelle, interrogeant l'autre, parfois souffrante, parfois patiente, parfois jouissante, consciente (?) de son obsolescence programmée.

  Il s'est joué en haut de la tour d'un HLM de Bagnolet, dans l'atelier d'un peintre qui parlait doucement et nous montrait tendrement ce qu'on ne peut regarder en face,  une des plus importantes aventures picturales du XXeme siècle.

 

 

Femme allong-e.jpg

 

 

"Ma peinture est un discours silencieux, sans mots. Les descriptions ne tiennent pas compte de la tendresse et de l'amour que je porte à mes personnages dans mon travail. Ces corps nus que je peins, je les caresse et je les travaille jusqu'au moment où je suis moi-même fasciné par leur présence sur la toile, présence que toute la beauté de la peinture doit concourir à porter à son maximum d'efficacité. Et j'ai conscience qu'il y a derrière ma démarche d'aujourd'hui, derrière cette fascination du corps nu, vingt siècles - et bien plus - de peinture surtout religieuse - vingt siècles de Christ morts, de martyrs torturés, de révolutions sanglantes, de massacres, de rêves brisés, et que c'est bien dans le corps, dans la chair, que finalement s'écrit l'histoire des hommes, et peut-être même l'histoire de l' Art."

Jean Rustin

 

 

 

lien utile: fondation Rustin

"Ma peinture est un discours silencieux, sans mots. Les descriptions ne tiennent pas compte de la tendresse et de l'amour que je porte à mes personnages dans mon travail. Ces corps nus que je peins, je les caresse et je les travaille jusqu'au moment où je suis moi-même fasciné par leur présence sur la toile, présence que toute la beauté de la peinture doit concourir à porter à son maximum d'efficacité. Et j'ai conscience qu'il y a derrière ma démarche d'aujourd'hui, derrière cette fascination du corps nu, vingt siècles - et bien plus - de peinture surtout religieuse - vingt siècles de Christ morts, de martyrs torturés, de révolutions sanglantes, de massacres, de rêves brisés, et que c'est bien dans le corps, dans la chair, que finalement s'écrit l'histoire des hommes, et peut-être même l'histoire de l' Art."

 

"Ma peinture est un discours silencieux, sans mots. Les descriptions ne tiennent pas compte de la tendresse et de l'amour que je porte à mes personnages dans mon travail. Ces corps nus que je peins, je les caresse et je les travaille jusqu'au moment où je suis moi-même fasciné par leur présence sur la toile, présence que toute la beauté de la peinture doit concourir à porter à son maximum d'efficacité. Et j'ai conscience qu'il y a derrière ma démarche d'aujourd'hui, derrière cette fascination du corps nu, vingt siècles - et bien plus - de peinture surtout religieuse - vingt siècles de Christ morts, de martyrs torturés, de révolutions sanglantes, de massacres, de rêves brisés, et que c'est bien dans le corps, dans la chair, que finalement s'écrit l'histoire des hommes, et peut-être même l'histoire de l' Art."

 

25/01/2013

pourquoi je n'aime pas Renoir, ni le film

Quand Jean Rustin dit que pour peindre avec tendresse il prend un pinceau tout doux, j'y crois. Je crois à sa tendresse pour les visages humains qui, dans ses toiles, nous regardent, et ne nous demandent rien. Je crois à sa bonté, à son humilité de peintre, à la générosité d'une oeuvre sans facilité, arrivée au dépouillement, au dénuement, à la simplicité et dont la contemplation nous enrichit.

C'est le parcours abouti d'un artiste qui n'a cessé de travailler toute sa vie.

Rustin est un peintre qui regarde l'autre sans prédation. Et le reconnaît. Cet "autre" c'est lui même, c'est nous aussi, c'est l'humain sans travestissement et sans parade. Pas forcément celui qu'on a envie de voir dans le miroir.

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Rustin-1994-La-Chemise-Bleu.gif

 

En allant sans conviction voir le film sur Renoir, avec le grand Michel Bouquet, capable de donner corps à n'importe qui, j'espèrais percevoir un peu de ce souffle qui tient en éveil, jusqu'à la mort, celui qui peint, comme si le pinceau faisait office de perfusion vitale, comme si toute la vie (fragile) qui restait ne tenait qu'à ce mouvement minuscule et dérisoire du poignet, apportant des couleurs sur une toile, jouant avec une touche de lumière, avec l'ocre des chairs, et la rondeur des formes...

Si l'acteur garde une intensité qui lui est propre et sauve le peu qu'il y a à sauver, car un film ne se bâtit pas sur le seul talent d'un acteur, il ne peut faire de Renoir autre chose que cet amateur de flancs arrondis et de seins offerts, de peaux de jeunes filles, cet obsédé du plaisir de vivre (tandis que la guerre tue ses enfants) à qui maintenant tout échappe. Il ne peut plus se lever, il souffre, il ne peut plus coucher avec ses modèles mais il arrive encore à les peindre, et seul le pinceau attaché à ses doigts déformés est encore capable de toucher virtuellement avec délices les chairs fascinantes; la peinture chez Renoir est un prétexte; elle sert à faire croire au bonheur. Pourquoi pas? Mais on n'est pas obligé d'y trouver son compte.

Chez Rustin la peinture est vie, pas discours ou démonstration et ne fait pas de prosélytisme pour une quelconque vision de l'humaine condition; elle ne fait pas écran non plus. Rustin creuse l'humain à la recherche du disque dur. Il dérange forcément; la peinture est chez cet artiste non pas un baume mais un cheminement qui va à la rencontre de l'inconnu; cette rencontre n'est pas toujours facile, ou apaisante, encore moins thérapeutique; c'est une aventure, un voyage, une épreuve; pas une croisière pour bourgeois gentilshommes.

Quignard dit magnifiquement qu'il n'y a pas de véritable joie sans mélancolie. Il me semble que Rustin est le plus profond  mélancolique de la peinture contemporaine.

  Renoir balaye la surface comme on fait des mèches chez le coiffeur. C'est joli, ça fait de l'effet, ça séduit. Le modèle est bien choisi, il donne ce qu'il peut donner: la beauté visible d'un corps lumineux, une sorte d'insouciance, d'impertinence aussi, par ce constant débordement de sève qui semble à chaque nouvelle peinture se moquer du temps qui passe; la constance et l'unité de l'oeuvre sont frappantes (je ne dis pas suspectes mais je le pense!); pour défier ce  temps qui passe pourtant, Renoir a trouvé la solution: il change de modèle!

Le film aurait pu s'accrocher à ce sillon: le désespoir d'un homme au seuil de la mort, dont l'univers s'est rétréci, assez égoïste somme toute dans sa belle maison et son jardin merveilleux, soigné par une sorte de harem dévoué, et que la peinture, celle qu'il a toujours faite, tient en vie, tandis que le monde entre pour longtemps dans la grande guerre; d'ailleurs le retour du fils blessé (assez falôt) est tout aussi insipide et plat que les rares évocations de ce conflit qui bouleverse le monde entier, partout ailleurs, hors de ce petit paradis renoirien avec vue sur la mer.

Mais comme la peinture de Renoir, le film reste en surface, distribue quelques beaux effets, se sert de l'image pour combler le vide, mais il n'incarne pas; on attend qu'il commence tout le long, en réalité, il n'a fait que planter le décor; ce film est un décor.

Impitoyable, la critique des cahiers du cinéma:"Moi, il me faut du vivant", martèle Auguste... Nous aussi, pourrait-on rétorquer devant cette débauche inutile de paysages provençaux et de peaux laiteuses." J'y souscris!!

La différence entre Rustin et Renoir peut se résumer ainsi: jamais la peinture de Rustin ne se retrouvera sur les boites de chocolat.

 

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